jeudi, avril 16, 2009

BENOIT XVI

PAPE APRES JEAN-PAUL II

Le cardinal Ratzinger, aujourd’hui Benoit XVI, semble inconfortable dans ses habits sacerdotaux; de même que dans sa charge papale. Et si ce dernier ministère semble tant de lui peser, c’est parce qu’il l’assume à la suite d’un géant, Jean-Paul II.
Au niveau de l’image, cruciale en ces temps où le paraitre définit la quintessence de l’être- qu’il s’agisse du pape ou d’un capo maffieux- un fossé sépare les deux hommes : Jean-Paul II savait frapper l’imaginaire par une maitrise quasi hollywoodienne de ses prestations. Acteur-né, le cardinal Carol Wojtila jouait avec brio sur l’émotion de ses contradicteurs. C’est-à-dire l’humanité entière, les catholiques en moins. Son successeur peine encore à passer son message, pourtant le même qu’hier et autrefois. Un message quasi immuable et qui procède de la doctrine de l’Église catholique romaine et apostolique.
EMERY G. UHINDU-GINGALA


Les "bourdes" de Benoit XVI, bravement et ingénument proférées lors de son dernier périple africain, ont fait le tour du monde. Les propos du pape sur l’usage du préservatif ont choqué jusqu’aux plus dévots des ses fidèles. D’aucuns ont vu là l’expression d’un enfermement idéologique exacerbé, sinon qu’un conservatisme parvenu à son paroxysme.
Au vrai, les contempteurs du souverain pontife se sont saupoudré d’un grain d’ignorance et, c’est le cas de le dire, de beaucoup de mauvaise foi. Car le "risque" rattaché à l’usage du préservatif, ainsi que l’entendait le pape- tout le monde aurait du l’entendre de cette oreille- ne participe guère de l’usage de l’objet en soi. Mais de la fausse sécurité que procure sa pratiquée répétée; l’idée que le préservatif est une panacée, et que qui l’utilise ne risque rien!
Cette proposition, universellement entendue, a également pour conséquence d’encourager une sexualité débridée; surtout chez les jeunes, les premiers visés par les propos du chef de l’Église catholique. Or donc l’on sait qu’il existe un risque, même si minime il est vrai, de contamination par le VIH nonobstant toute protection. D’où la prescription, directement tirée de la doctrine catholique, de l’abstinence jusqu’au mariage. Et de la fidélité dans le mariage!
Il y a donc un contexte que tous se sont empressés d’escamoter, pour présenter une phrase qui exprimait peu cependant qu’elle en disait long…
Qu’à cela ne tienne, Benoit XVI n’est surement pas le Sud-africain Jacob Zuma, leader de l’ANC, qui soutint jadis inconsidérément qu’une bonne douche suffisait à se débarrasser du virus du sida!
Qu’on ne s’y trompe pas, le cardinal Ratzinger est un intellectuel, un penseur au fait des tenants et aboutissants des turpitudes de son temps. Le pape n’ignore donc rien de tout ce qui touche le virus du VIH; et de la virulence de la maladie. Il n’a eu à émettre qu’un avis conforme à sa foi, à la doctrine qui fonde cette dernière depuis les temps immémoriaux. Rien de nouveau en somme. Surtout que Jean-Paul II lui-même jadis ne disait rien d’autre que ce que professe aujourd’hui son successeur. Sans cependant subir les foudres des bien-pensants. Celui que tous, lors de ses funérailles, appelèrent à la sanctification- "Santo subito"- soutenait des positions aussi rigides, et parfois même plus radicales que celles de Benoit XVI. Ainsi du préservatif Jean-Paul II n’était pas non plus, loin s’en faut, le plus fervent défenseur…
A la notable différence qu’avec lui ça passait. En somme avec lui tout passait. "Pope-star", chouchou des médias et donc du public, l’ancien évêque de Varsovie avait atteint un tel niveau de popularité, et emmagasiné un tel capital de sympathie- l’on peut d’ailleurs se demander pourquoi- qu’il pouvait se permettre de gêner sans s’attirer l’ire du public.
C’est justement cela le problème de Benoit XVI : il est pape certes, mais à la suite de Jean-Paul II! Le charisme de ce dernier lui fait cruellement défaut. Ne pouvant soutenir la comparaison avec son prédécesseur Benoit soutient sa foi- et par elle il est soutenu.
Or, et l’on tend à l’oublier, tout ce que disait Jean-Paul II venait de Benoit XVI! Ce dernier était celui qui pensait et organisait les politiques philosophico-spirituelles de son patron; et partant, de l’Église catholique dans son ensemble. Le cardinal Ratzinger était une sorte d’idéologue du parti. Dont les conclusions intellectuelles procédaient d’une adéquation des faits contemporains avec la doctrine de l’Église catholique romaine. Les énoncés qu’il fait aujourd’hui publiquement doivent nécessairement respecter les principes fondateurs de sa foi. Érudit, l’homme l’est à plu d’un titre, et bien plus que la plupart de ceux qui s’astreignent, parfois seulement pour faire comme d’autres, à le clouer au pilori.
Le professeur- de théologie- Ratzinger est donc fortement instruit des choses intellectuelles. En plus de s’occuper des celles exclusivement spirituelles!
Au vu du tollé qu’ont provoqué les dernières déclarations du pape lors de sa courte tournée africaine, il faut s’attendre à ce que le souverain pontife choque beaucoup; et se fasse détester souvent. Rien pour intimider, ou même seulement étonner, celui dont le volontarisme n’est plus à démontrer. Dès le début de son pontificat Benoit XVI avait fait le pari, qu’il est hélas entrain de remporter, que l’Église catholique, sous son autorité, se viderait probablement de ses adeptes; et qu’il n’y demeurerait que … des fidèles!
C’est tout dire…
L’homme, que nul n’en doute, ne transigera jamais avec les préceptes de sa foi.
C’est que, bien plus que la plupart de ses prédécesseurs, Benoit XVI est profondément pénétré par la lourdeur de son ministère. Lequel ne peut souffrir, au nom de la rectitude politique, la moindre entorse à la morale chrétienne. Quoiqu’il en coutât. Quel qu’en soient les époques et les desideratas de ses contemporains, prompts à toutes les vicissitudes pour satisfaire aux exigences de la "modernité". Benoit XVI sait, ainsi que le savait Jean-Paul II avec lui, que la crédibilité de la charge papale ne saurait se déduire de l’assentiment populaire. La morale sociale, pour un pape, doit nécessairement être inspirée par la morale chrétienne. Et non pas l’inverse!
A l’ignorer, à méconnaitre la tradition philosophique qui régule le catholicisme, en a conduit plusieurs, même parmi les plus illustres, à répandre des contre-vérités. Et l’"athéisme institutionnel", ce phénomène de masse qui tarde à passer, s’en est servi pour pourfendre, á travers le messager, le message.
On dit que le cardinal Ratzinger, pendant le dernier conclave, pria pour ne pas être l’élu de ses pairs. Il souhaitait continuer de servir loin du halo des projecteurs, du crépitement des flashes, et des imprécations des "faiseurs de sens".
EMERY G. UHINDU-GINGALA